Conférence de presse

5 septembre 2001

Résultats semestriels 2001 de France Télécom

conférence de presse


Intervention de Michel Bon
La version orale prime sur la version écrite

« Vous connaissez maintenant nos résultats. Ils annoncent trois bonnes nouvelles. La première, vous venez de le découvrir, c'est qu'ils sont bons. Comparez-les avec ceux des autres opérateurs de télécoms européens, voyez ce qu'en ont dit les analystes après leur divulgation partielle : ils tiennent bien la route.

Les deux autres bonnes nouvelles se voient à l'analyse :
- notre stratégie tient ses promesses
- notre activité n'est pas affectée par le ralentissement économique.

Chaque jour, en effet, on en a l'impression, apporte son lot de mauvaises nouvelles. Y a-t-il une crise des télécoms ? Oui, pour l'amont de l'industrie, c'est à dire nos fournisseurs d'équipement.
Leur métier, qui est un métier d'industriel, est touché par une crise cyclique, phénomène classique de l'industrie manufacturière, qui est sans doute rendue plus profonde par l'incertitude technologique et par l'apport un peu artificiel de croissance suscité par l'ouverture à la concurrence à peu près en même temps partout dans le monde.

Mais il faut cesser de mettre dans le même panier le métier d'opérateur de télécom. Ce n'est pas un métier de manufacturier, mais un métier de grande consommation, qui offre un service de vie quotidienne, dont l'utilisation est très peu sensible à l'activité économique. Mieux, il se trouve que les services de communication que nous vendons sont des services que les consommateurs désirent et utilisent de plus en plus. Sous l'impulsion de nouveaux usages, comme le mobile ou Internet, la part des dépenses consacrée aux télécommunications par les ménages augmente régulièrement depuis quelques années, et aucune enquête ne montre l'infléchissement de cette tendance. De même les entreprises utilisent de plus en plus les télécommunications, qui représentent une part croissante de leurs coûts de fonctionnement en dépit de la baisse des prix.

Permettez-moi trois chiffres tirés du marché français pour illustrer la bonne santé de ce marché :
- Combien de français ont-ils acheté un mobile au cours du premier semestre ?
6,7 M.
Combien l'avaient fait au premier semestre 2000 ?
6,0 M.
Bien loin d'une crise, c'est de croissance qu'il s'agit : +10%.
- Combien de minutes de télécom les français ont-ils consommées au cours du premier semestre 2001 ?
110 milliards.
Et au cours du même semestre de 2000 ?
95 milliards :
+15%
- Combien de nouveaux foyers français se sont mis à utiliser Internet au cours du premier semestre 2001?
1,4 million.
Combien l'avaient fait au premier semestre 2000 ?
1 million :
+40%

La conjoncture économique n'a donc pas, vous le voyez, contrarié la croissance de notre marché. Son principal effet visible concerne les plus faibles des acteurs, qui ne trouvent plus en Bourse le financement de leur activité, ce qui favorise la consolidation du secteur. Cette consolidation est évidemment favorable aux acteurs les plus importants et parmi eux aux opérateurs historiques, comme le montre clairement le marché américain où les Rboc ont repris la main.

Pour conclure ces commentaires sur la conjoncture économique, permettez-moi d'ajouter que notre focalisation sur l'Europe qui est aujourd'hui la moins touchée par la crise, est pour nous un autre élément favorable comparé à des acteurs qui ont une exposition nord ou sud - américaine ou japonaise plus marquée.

C'est bien sûr très rassurant de constater cette bonne santé de France Télécom, mieux, de comprendre que le ralentissement économique ne l'affecte pas. Mais ce qui est le plus positif, la meilleure de ces trois bonnes nouvelles en somme, c'est de voir que notre stratégie délivre ses promesses. Maintenant que nous sommes à peu près où nous voulions être, nous voyons que cela marche, c'est à dire que cela nous apporte bien - et même un peu mieux que celà - ce que nous en attendions.

Revenons un court instant en arrière, sur notre stratégie, c'est à dire sur là où nous voulions aller, et là où nous sommes aujourd'hui. A la veille de l'ouverture à la concurrence en Europe, notre avenir était clairement prévisible : perte de part de marché sur nos activités en monopole, qui comptaient pour plus des trois quarts de nos ventes, baisse massive des prix et à la clé tous les problèmes d'une baisse des recettes compliqués par plus de rigidité qu'ailleurs dans les dépenses. Face à cette spirale de déclin, notre stratégie a visé à trouver des relais de croissance pour compenser, et au delà, les pertes de part de marché et les baisses de prix à venir sur la téléphonie fixe vocale en France.
Ces relais de croissance nous voulions les trouver :
- par l'augmentation du trafic téléphonique, stimulé par la concurrence et de nouveaux services
- par la montée en puissance de nouveaux usages comme les données, le mobile et internet.,
- par l'ouverture de nouveaux marchés, en mettant l'accent sur l'Europe qui nous semblait plus familière et sur les services mondiaux de données, où nous avions déjà une bonne expérience et une certaine avance.
Aujourd'hui, et on le voit clairement à travers les chiffres semestriels qui viennent de vous être présentés, ces relais de croissance sont bien là et tirent France Télécom de l'avant plus vite que jamais dans le passé :
- le mobile est devenu le principal contributeur de chiffre d'affaires du groupe : il représente plus du tiers de nos ventes.
- Internet, avec Wanadoo et Freeserve, et les données, avec tout Global One mais encore sans Equant, qui n'est consolidé qu'à partir de juillet comptent, pour près de 15% des ventes.
- Et les nouveaux marchés étrangers représentent maintenant plus du tiers de nos ventes.
résultats

Bien sûr, la cartographie d'un grand groupe n'est jamais figée, et dans l'univers changeant des télécoms, notre stratégie aussi évoluera. Mais en attendant, nous voici plus proches, et beaucoup plus proches qu'à la fin du 1er semestre 2000, de la position stratégique que nous voulions atteindre il y a cinq ans, avec un mix, une combinaison d'activités plus solide et plus dynamique.
Plus solide parce que nous dépendons de moins en moins de notre activité antérieurement en monopole, qui est la plus exposée aux aléas réglementaires. Plus dynamique, car plus de la moitié de nos ventes vient maintenant d'activités à forte croissance, dont la rentabilité augmente vite, comme vous le montre le transparent suivant.
Ce tableau résume en un coup d'œil notre pari stratégique : demeurer solide dans notre métier traditionnel, et vous voyez que nous y sommes bien parvenus, et faire levier sur les nouvelles activités : c'est maintenant très visible.résultats


Pour atteindre cette position favorable il y a eu, bien sûr, un prix à payer, que ce soit en terme de travail de l'entreprise sur elle-même, réorganisation, redéploiement des effectifs, productivité, ou en terme d'endettement, et j'y reviendrai, tout comme je parlerai du grand sujet des derniers mois, notre cours de bourse.

La Bourse a ses hauts, nous les avons connus (jusqu'à l'ivresse). Elle a ses bas (jusqu'à la lie), nous sommes en plein dedans.
Mais ce qui construit, sur la durée, la valeur d'une entreprise, c'est d'une part la justesse de sa stratégie, nous venons d'en parler, mais c'est d'autre part au quotidien, le comportement de ses clients et le travail de ses salariés. Passons donc un peu de temps sur notre quotidien : il parle très positivement de notre avenir.

Du côté de notre activité traditionnelle, la téléphonie fixe vocale en France, les nouvelles quotidiennes sont plutôt bonnes. La guerre des prix s'est calmée, ce qui a eu pour effet de ralentir beaucoup nos pertes de parts de marché. Alors que nous perdions un point par mois sur le marché de la longue distance, et ce depuis deux ans, nous n'avons plus perdu qu'un demi point par mois en 2001, cette perte se réduisant mois après mois au point que nous n'avons presque rien perdu depuis trois mois. Nos nouvelles offres, comme "ma ligne locale", qui a séduit 700 000 clients, ont été bien accueillies, et grâce à ces nouvelles offres et au travail de notre réseau commercial, notre stratégie de reconquête marque des points.
Au total, nous sommes parvenus à bien préserver le cash flow de cette activité traditionnelle pendant ces années où la concurrence était débridée. Nous devrions y parvenir aussi maintenant qu'elle s'assagit.

Du côté de nos activités nouvelles, qui représentent maintenant plus de la moitié de nos ventes, les nouvelles aussi sont positives.
Sur le marché des mobiles, nous avions plusieurs défis opérationnels à relever. D'abord réussir l'amalgame entre ce qui venait d'Orange et ce qui venait de France Télécom dans le nouvel Orange. Vous verrez demain matin les résultats d'Orange plus en détail : ils ne sont pas du tout ceux d'une entreprise qui aurait des états d'âme et serait en train de rater sa fusion, non, ils sont tout le contraire, ceux d'une entreprise en pleine santé, forte et conquérante. Alors que certains, en mai 2000 craignaient le choc des cultures, c'est le poids des bons résultats que nous engrangeons. Autre défi, celui de continuer à grandir vite, tout en réduisant les coûts d'acquisition et de fidélisation : c'est le cas. Nous avons conservé nos parts de marché en France, conquis la première place en Grande Bretagne, et accru le nombre de clients abonnés ("post paid") tout en réduisant les coûts d'acquisition. Enfin, nous avions le défi de faire aller plus vite vers la rentabilité, voire la maturité, nos opérations dans le reste du monde : vous le verrez, les progrès sont spectaculaires, notamment en Suisse où nous avons repris le contrôle managérial il y a moins d'un an.

Orange, grâce à sa taille et à son degré de développement bénéficie maintenant clairement d'une forte croissance de ses marges qui est inscrite durablement au cœur de son modèle économique.

Du côté de Internet et de Wanadoo, nous avons su conjuguer croissance, avec notamment l'intégration de Freeserve et recherche de la rentabilité. Comme le montrera Wanadoo plus en détail demain matin, les marges de l'accès à Internet en France se sont améliorées, et sont même devenues positives si on fait abstraction des frais d'acquisition d'abonnés. Nous nous sentons maintenant beaucoup plus sûrs de nous en annonçant que nous atteindrons pour le groupe Wanadoo un excédent brut d'exploitation (EBITDA) positif dans le courant de 2002.

A côté de ces deux relais de croissance déjà bien identifiés que sont le mobile et internet, d'autres sont en train de grandir, du côté des données.

Nos réseaux en France, mais aussi à l'étranger sont capables de soutenir la forte croissance des débits que demandent nos clients et qui sont la base de nouveaux usages et de nouveaux développements. En matière de capacité, nous anticipons constamment, et en matière de service, nous innovons constamment.
Ces hauts débits sont à la disposition de tous, particuliers et entreprises. Et il devient plus facile et moins coûteux d'y accéder grâce à la technologie de l'ADSL, que nous déployons rapidement en France. A mi-année 2001, la moitié de nos lignes est équipée, ce qui permet une action commerciale plus forte, qui devrait faire passer le nombre de clients de 200 000 aujourd'hui à 500 000 environ à la fin de l'année. Et ce nombre devrait plus que doubler en 2002. La deuxième vie du fil de cuivre démarre bien.

Pour les plus grandes entreprises, nos "solutions entreprises" en France, et Equant dans le monde entier nous mettent en très bonne position. Quoique Equant ne soit pas du tout consolidé dans les comptes semestriels que nous venons de présenter, je voudrais cependant marquer son entrée dans le Groupe France Télécom. Les réseaux mondiaux d'entreprise sont une vieille passion de France Télécom. Dès la fin des années 1980 notre filiale de données, Transpac, essaimait à l'étranger. Et la recherche d'une taille mondiale, qui est nécessaire dans ce domaine, était la principale motivation de notre alliance avec SPRINT pour constituer Global One. C'est parce que nous connaissons bien ce métier et que nous croyons en son avenir, que nous avons repris à 100% Global One après la dislocation de notre alliance avec Deutsche Telekom. Sa fusion avec Equant a constitué un leader mondial, qui dégagera très vite de fortes synergies de l'effet de taille ainsi atteint. Comme l'a indiqué Didier Delépine en présentant les résultats d'Equant, cette entreprise est sur la voie d'une progression très rapide de sa rentabilité et devrait dégager un EBITDA positif dès le second semestre 2001.

Bien entendu, tout ceci se fait dans le cadre d'un groupe unifié, ce qui nous donne un réel levier d'innovation pour proposer à nos différents clients des produits au plus près de leurs besoins.
Un seul exemple : en France, Orange est le leader sur le marché mobiles entreprises avec plus de 60% de part de marché. En s'associant à Equant, leader sur le marché des services globaux aux entreprises, Orange a les moyens de devenir un leader du marché de la téléphonie mobile entreprises.

Au moment où on a l'impression que les commentaires sur France Télécom se focalisent sur son seul cours de bourse, permettez-moi d'insister : ce sont les fondamentaux de l'entreprise qui font sa valeur. Et ces fondamentaux sont très bons, et très solides.
- nous agissons dans un secteur en forte croissance et notre activité n'est guère affectée par la conjoncture économique.
- nous sommes centrés sur une seul métier, les télécoms, et nous sommes capables de tirer toutes les synergies qui existent entre les différentes facettes de ce métier.
- notre groupe est solide techniquement avec une R&D et des réseaux parmi les meilleurs du monde, et solide financièrement avec une forte génération d'EBITDA.
- notre mix d'activités est bien ancré sur des segments en forte croissance et il est bien équilibré internationalement.
- nous avons des positions de premier plan sur les segments les plus dynamiques : leader mondial avec Equant, numéro deux européen du mobile avec Orange, numéro trois européen de l'internet avec Wanadoo et Freeserve.
fondamentaux

C'est parce que nos fondamentaux sont solides que nous serons capables de continuer à progresser malgré un environnement boursier devenu très défavorable.

Venons-en donc à la Bourse et à la dette. Car les deux sujets sont très liés. C'est la chute de la Bourse qui a compliqué notre plan de financement et fait apparaître puis alourdir le problème de notre dette. Et en retour, c'est notre dette qui a fait plonger et plombe aujourd'hui notre cours de bourse. La plupart des analystes aiment bien notre stratégie, mais ils n'aiment pas la dette qui va avec. Quand ils regardent plutôt la stratégie, c'était le cas l'an dernier, notre cours va bien. Quand ils ne regardent plus que la dette, comme aujourd'hui, notre cours va mal.
Moi je ne vois, tout du long, que nos fondamentaux, qui sont bons - j'y insiste.
Notre dette n'est pas un risque, mais un poids, que nous allégerons.
Nous reviendrons, d'ici fin 2003, comme nous nous y sommes engagés, à une situation financière convenable dans un secteur comme le nôtre avec un ratio de dette nette sur EBITDA se situant entre 2.5 et 3, c'est à dire un niveau très convenable.
Comment y parviendrons-nous ?
D'abord, et surtout, par l'évolution favorable de notre excédent brut d'exploitation (EBITDA).
Comme le montre ce tableau que je vous ai déjà présenté, notre positionnement stratégique nous permet de combiner la bonne résistance de la rentabilité de notre activité traditionnelle et la forte croissance de celles de nos activités nouvelles. La tendance est claire, et ce que vous verrez en détail en analysant les comptes vous le confirmera : nous avons devant nous plusieurs années de croissance à deux chiffres de notre EBITDA. Pour 2003, le consensus des analystes est dans la zone des 16 à 17 milliards d'Euros : cet objectif me paraît accessible.
Parallèlement nous réduirons le montant de notre dette. D'abord, là aussi, par l'évolution favorable de nos activités. Les dépenses d'investissement sont bien sous contrôle, comme le montre le premier semestre de cette année, où nous sommes déjà proche d'avoir un cash flow disponible positif. La croissance prévisible de notre EBITDA accentuera cette tendance et sur les deux années 2002-2003 le cash flow disponible c'est à dire après frais financiers, impôts et amortissements devrait être positif d'un montant global de 2 à 4 milliards d'Euros.
Simultanément nous poursuivrons notre programme de cession d'actifs, dont JLVinciguerra vous a indiqué les grandes lignes. Tout ceci devrait ramener notre dette dans la zone des 40 à 45 milliards d'Euros fin 2003. Ce chiffre est supérieur à celui que je vous ai présenté en mars tout simplement parce que, comme vous le savez les marchés boursiers ont fortement baissé depuis dans notre secteur. Et le risque d'exécution principal de ce plan est bien là, dans la tenue du marché boursier, que personne ne peut prévoir.
Mais si je ne peux pas prévoir la Bourse, je peux cependant me préparer.
D'abord me préparer au pire : si l'on se place dans le scénario très noir que décrivait tout à l'heure JL Vinciguerra, dans lequel le marasme boursier actuel se poursuit pendant les 30 mois qui viennent, alors, oui, notre dette ne baisse que très peu. Mais ce n'est pas pour autant la fin du monde.
- Notre ratio dette/EBITDA est de l'ordre de 3,5. De très belles entreprises ont actuellement des ratios de cet ordre.
- Les frais financiers ne représentent que 20% environ de l'EBITDA.
- Et notre cash flow disponible après investissement, frais financiers et impôts reste positif et augmente régulièrement.
Et la seconde chose à laquelle je peux me préparer, c'est à une remontée de notre cours de bourse. J'ai la conviction que nos cours se redresseront pendant cette période. Si vous prenez pour bons les chiffres que je viens de vous présenter, c'est à dire l'EBITDA de 16 à 17 milliards d'Euros du consensus pour 2003, et une dette de 45 milliards d'Euros à cette date, ceci représenterait une valeur d'entreprise de 85 milliards d'Euros, si nous valions alors encore 35 Euros soit à peine plus de cinq fois l'EBITDA. Je ne crois pas qu'une entreprise solide dont la rentabilité est en forte croissance, et qui est aussi bien positionnée sur des marchés en plein développement puisse être durablement aussi mal valorisée.
Quoi qu'il en soit, et dans tous les scénarios, même les plus noirs, France Télécom assure facilement avec son cash flow le service de sa dette et autofinance ses investissements sans avoir à augmenter son capital et sans avoir à céder de titres Orange.

La crise, elle est peut-être passagèrement en Bourse : elle n'est ni dans notre activité, ni dans nos comptes, ni dans notre moral. Notre stratégie produit ses résultats, et ils sont très encourageants. On le voit sur les comptes de ce premier semestre, on le verra aussi bien sur ceux de l'année 2001 toute entière.
La progression annuelle du chiffre d'affaire pourrait être d'environ 25%, l'effet consolidation d'Orange ne jouant plus que sur deux mois au cours du second semestre. Et la croissance de l'EBITDA pour l'ensemble de l'année devrait être du même ordre que celle observée pendant le premier semestre, autour de 14/15%. »


Copyright(c) . Created: 10/09/01 Updated: 10/09/01